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Album

 

Texte envoyé par Charles Juliet à Jean-Pierre Bréchet le 16.02.07

Vos ‘labours’, vos ‘sillons’ me touchent tout particulièrement, parlent à mon enfance, à ma part la plus intime…

Alors que j’étais enfant, par un sombre et venteux après-midi d’automne, mon père et moi étions occupés à herser une terre que nous venions de labourer. La herse était trop légère, et pour l’alourdir quelque peu afin qu’elle morde plus profondément dans les mottes, il m’avait fait asseoir sur l’une des barres transversales. A une extrémité du champ, les deux vaches qui constituaient l’attelage virèrent un peu trop court. La herse se retourna sur moi, et je fus traîné sur quelques mètres. Bien évidemment je cherchai à crier, mais avant même que je comprenne ce qui m’arrivait, ma bouche était pleine de terre, et je ne pus émettre aucun son.

J’ai souvent repensé à cette scène, car il me semble qu’il en va parfois ainsi à certains moments de détresse. Nous voudrions crier, nous délivrer, appeler au secours, mais je ne sais quelle mauvaise terre nous emplit la bouche, et nous restons muets.

 

Charles Juliet, Note figurant dans un tome de mon Journal

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